![]() Salomon Bleckmans et Menahem Perez... Sur le pas de la porte de la boutique où je travaille, vers 10h 30, un vieil homme passe, me regarde puis me dit: "vous êtes juif?!" Je lui réponds naturellement que oui. A mon tour je lui pose la même question, il me répond : "Je suis un rescapé d'Auschwitz. Je suis fier d'être juif, mais je ne crois plus en rien!!!" Impressionné par sa réponse, je ne savais pas trop quoi lui dire, et lui demandai : "Est-ce que nous pouvons nous faire photographier ensemble ? Plus tard, je la montrerai à mes enfants!!" "Bien sûr, avec plaisir!" me dit-il. On a par la suite sympathisé en Yiddish... et il m'a demandé si je pouvais faire développer une photo pour lui également. J'ai repris mes activités normalement et cette histoire m'est sortie de la tête. Un jour, une femme entra dans la boutique pour me demander si elle pouvait avoir un double de la photo que j'avais prise avec son mari. Gêné, je lui promis de faire un double rapidement. Je lui demandai son nom et son numéro de téléphone et lui promis de la rappeler au plus tôt. Une fois le développement effectué, je téléphonai et demandai si son mari pouvait venir la chercher lui même. Depuis notre rencontre j'avais ma petite idée en tête, celle de pouvoir lui faire profiter de la Mitsva des Téfilines (qui sait...). Lundi 11 mai 2009, 17 iyar 5769 Salomon Blekmans, c'était son nom, entra dans la boutique. Je lui remis la photo, il était très heureux et me remercia chaleureusement. A ce moment, je lui demandai: " Mr Blekmans, avez vous deux minutes?" - "Bien sûr mon garçon, pourquoi? - "Pour une grande Mitsva!" - "Une Mitsva??!, vous savez, moi les Mitsvote, je n'en veux pas, et je vais vous dire pourquoi. Quand j'ai été déporté à Drancy, après m'être échappé du train et capturé par la suite dans la forêt par la Gestapo, je me suis forgé une réputation de caïd, car j'avais eu beaucoup de courage d'avoir accompli une telle prouesse. Les allemands décidèrent donc, qu'avant de m'envoyer à Auschwitz, je ferai une escale à Varsovie!!! A l'époque, c'était juste après la révolte des juifs du ghetto, jusqu'au 16 Mai 1943, les allemands avaient assassiné tous les résistants, et comme ils avaient peur des maladies, il avait décidé de brûler tous les corps! Mon travail à moi était de rassembler les corps par dizaines et de déposer des poutres en bois qui provenaient des immeubles effondrés. Les nazis arrachaient les dents en or des cadavres et versaient de l'essence sur les corps pour les brûler!!! Vous comprendrez mon ami que les Mitsvote, c'est pas pour moi! " Je l'ai écouté avec beaucoup d'attention et de tristesse à la fois. A cet instant précis, le fait de lui demander deux minutes pour la Mitsva me mit mal à l'aise. Après un blanc d'une dizaine de secondes, qui semblèrent une éternité, comme si D. lui avez mis ces paroles dans la bouche, il me dit : "Mais vous m'êtes sympathique et je vous aime bien, alors faites ce que vous voulez de moi, vous voulez le bras droit ou le gauche?" ![]() Après la mise des Tefiline, j'ai ouvert une petite bouteille de boukha, et nous avons bu en se souhaitant... Le’haïm, à la vie!!! Salomon Bleckmans, juif originaire de Paris, rescapé d'Auchwitz, déporté en 1943 d'abord à Drancy, puis à Varsovie, enfin à Auschwitz par les nazis. En ce lundi 17 Iyar 5769, à 90 ans, il mit les Tefiline pour la 3ème fois de sa vie... Source : www.hassidout.org, le 25 Mai 2009 |