Les Minhagim des Mékoubalim

Que faire lorsque la Kabala et la Halakha sont en Ma'hlokèt (en opposition) ? Y a t-il des exeptions et y a t-il difèrents avis parmis les Poskims d'afrique du nord.
Bravo pour votre exellent travail, et merci de citer vos sources.

Rav Meir Cahn
Lorsque les Maîtres du Zohar ou de la Kabbala (la Kabbale) sont en discussion avec le Talmud sur un point de Halakha, nous suivrons le Talmud (1). De même pour les périodes postérieures à la clôture du Talmud, lorsque les Kabbalistes (postérieurs) sont en désaccord avec les Poskim (les Décisionnaires), nous serons tenus de suivre les Poskim (2).

Car, contrairement à la Kabbala, les dires des Maîtres mentionnés par le Talmud ont été émis afin d’être mis en pratique, Halakha Léma’assé (en temps qu’Halakha appliquée). Ainsi ils furent transmis de génération en génération, jusqu’à ce qu’ils fussent compilés par les Sages qui clôturèrent le Talmud (3).

De plus, la difficulté à comprendre et à interpréter le Zohar, ne permet pas d’en tirer des enseignements uniformes. L’absence de rigueur – cet élément fondamental à la codification de la Halakha – aurait amené à la pratique d’une Tora hétérogène : chacun aurait modelé sa propre Tora, au gré de ses interprétations personnelles du Zohar (4).

Par ailleurs, les écrits du Zohar sont attribués à Rabbi Chim’one Bar Yo’haï, alors que les écrits du Talmud relèvent des avis de ses nombreux collègues. Or, la règle veut que nous suivions l’avis de la majorité, chaque fois qu’une divergence d’avis se présenterait (5). Enfin, et dans la majorité des cas, lorsque Rabbi Chim’one Bar Yo’haï est mentionné dans le Talmud, la Halakha ne suit pas son avis (6).

Ceci dit, les Décisionnaires stipulent que lorsque les Maîtres de la Kabbala se veulent plus stricte que la Halakha, il y aura lieu de les suivre (7) – bien qu’il ne soit néanmoins pas en notre pouvoir d’imposer ces ‘Houmrote (ces conduites strictes) (8) – et à plus forte raison s’il se trouve que la coutume exige l’application de ces ‘Houmrote (9) ; dés lors, ˝Minhag Mévatèl Halakha˝ - une coutume qui trouve sa source dans un texte toraïque autre que le Talmud, tel que dans la Massé’hèt Sofrim, la Massé’hèt Sma’hote, dans un Midrach, dans la Péssikta de même que dans le Zohar - aura force de Halakha.

Ceci, à condition que cette coutume ait été instituée par les Anciens (Minhag Vatikin), et qu’elle ait été ensuite pratiquée au fil des générations (Ich Mipi Ich) (10). Donc, si ces ‘Houmrote (ces conduites strictes) ne répondent pas aux critères mentionnés, elles ne seront pas imposables, mais il serait recommandé de les suivre.

Il est à signaler cependant, que cette ˝autorisation˝ à pratiquer des ‘Houmrote qui ne sont pas couramment observées, n’est pas évidente. En effet, se montrer plus strict qu’autrui, lorsque la ‘Houmra n’est pas fondée au niveau de la Halakha, équivaudrait à dénigrer autrui, en permettant de sous-entendre que l’attitude des autres est négligente (Mé’hzé Kéyouhara) (11). De plus, cette conduite singulière pourrait amener à la discorde (12).

Enfin, lorsque les Poskim (les Décisionnaires) sont en désaccord sur un point de Halakha, et qu’il se trouve que la Kabbala se prononce sur la question, on optera pour l’avis qui sera soutenu par la Kabbala (13).

Kol Touv
1) Bèt Yossèf, Ora’h ‘Haïm chap. 28, par. 5 ; Choute Maharchal, chap. 98 ; Choute Radvaz, tome 4 chap. 1111 par. 36 ; Maguèn Avraham, chap. 25 alinéa 20 ; Graz, Ora’h ‘Haïm chap. 25 par. 28
2) Bèt Yossèf, ad. loc ; Choute Radvaz, ad. loc. ; Maguèn Avraham, ad. loc. ; Graz, ad. loc. ; Choute ‘Hakham Tsvi, chap. 36
3) Séfèr Yétsira, page 187
4) Choute ‘Hakham Tsvi, ad. loc.
5) Chéilate Ya’avèts, tome 1 chap. 47
6) Choute Maharchal, ad. loc.
7) Maguèn Avraham, ad. loc. ; Graz, ad. loc.
8) Graz, ad. loc. Voir aussi le ‘Hida dans Péta’h ‘Énaym, Baba Métsia 30a, et dans Ya’ir Ozèn, chap. 80 par. 13 ; le Choute Imré Bina, Ora’h ‘Haïm chap. 13 par. 4 ; le Choute ‘Haïm Chéal, chap. 1
9) Maguèn Avraham, chap. 690 alinéa 22 ; voir aussi le Choute ‘Hatam Sofèr, Ora’h ‘Haïm chap. 36
10) Maguèn Avraham, ad. loc. ; voir aussi le Tossafote, Bérakhote 18a intitulé Léma’har, Péssa’him 40b, intitulé Aval ; le Roch, Mo’èd Katane Pérèk 3 chap. 80 ; le Choute Avkate Rokhèl, chap. 28
11) Voir Baba Kama 81a et 81b, et Rachi, ad. loc. intitulé Guédoulato, ainsi que la Chita Mékoubétsèt, ad. loc. au nom du Gaone, et du Méïri ; voir aussi Rachi, Péssa’him 55a intitulé Litol Lo ; voir encore le Choute Avkate Rokhèl, chap. 36 ; le Choute Iguérote Moché, Yoré Dé’a tome 1 chap. 257 et chap. 62 ; ainsi que le Choute Réèm, chap. 15 ; le Choute Binyamine Zéèv, chap. 71 et 296 ; le Choute Maharil, chap. 137 ; le Taz, Ora’h ‘Haïm chap. 652 alinéa 2 et le Kaf Ha’haïm, ad. loc. par. 12 ; le Pit’hé Téchouva, Yoré Dé’a chap. 246 alinéa 10, le Choute Chévoute Ya’akov, tome 2 chap. 44, le Sdé ‘Hémèd tome 3 page 55
12) Voir le Bèt Yossèf, Ora’h ‘Haïm fin du chap. 624 ; le Choute Mé’il Tsédaka, chap. 50 ; le Choute Dévar Chémouèl, chap. 46 ; le Choute Iguérote Moché, Ora’h ‘Haïm tome 4 chap. 34
13) Choute ‘Hakham Tsvi, ad. loc. Voir aussi le ‘Hida, dans Péta’h ‘Énaym ad. loc, et dans Ya’ir Ozèn ad. loc, ainsi que le Choute ‘Haïm Chéal, ad. loc.