Comment acquitter son prochain du Birkate Hamazone
Est ce que la lecture à voix haute du Birkate Hamazone acquitte tous les invités attablés ensemble ?
Rav Abraham Garcia
Effectivement, en règle générale, on peut acquitter son prochain du Birkate Hamazone ainsi que beaucoup d'autres bénédictions (1). Et ceci, même si la personne qui désire se rendre quitte est capable de le faire par elle même (2). Mais cela ne peut être fait uniquement à postériori (Bédi 'Avad) mais jamais à priori (Lékhaté'hila) (3).
Le Michna Béroura (4) rapporte plusieurs avis qui permettent de s'acquitter même dans le cas où la personne ne comprend pas le Lachone Hakodech (5).
Le Choul'hane 'Aroukh émet pense toutefois qu'il faut que la personne qui désire se rendre quitte, puisse être en mesure de comprendre l'hébreu (Lachone Hakodech) (6).
Voila pourquoi il serait préférable dans ce cas, que la personne qui désire s'acquitter, répète mot à mot, tout le Birkate Hamazone après celle qui récite la bénédiction (7).
A la différence du Motsi (bénédiction sur le pain en début de repas), pour qui selon la majorité des Décisionnaires, on pourra à priori (Lékhaté'hila) rendre quitte les participants présents (8), le Birkate Hamazone est différent et devra Lékhaté'hila être dit par chacun pour soit même.
Les Richonim (Décisionnaires médiévaux) apportent deux raisons pour expliquer cette différence:
1) Le Birkate Hamazone est un acte qui va entrainer la séparation des convives puisqu'il marque la fin du repas alors que le Motsi rassemble des personnes qui vont partager un repas (9).
2) Le Birkate Hamazone est une obligation explicite de la Torah et a beaucoup plus de poids que la bénédiction du Motsi qui n’est pas explicitement de la Torah(10).
Il est donc évident que si nous avons des invités qui ne savent pas faire le Birkate Hamazone, on pourra les en acquitter.
Ainsi le Yalkoute Yossèf rapporte au nom du Rav 'Ovadia Yossèf zal, qu'une personne malade pourra s'acquitter en écoutant le Birkate Hamazone récité par autrui.
Néanmoins, celui qui veut acquitter autrui devra consommer au minimum un Kazaïte de pain (volume correspondant à 17 grammes de nourriture solide et selon certains à 30 grammes).
Dans le cas contraire, il ne pourra en aucun cas rendre quitte une autre personne (11).
Par ailleurs, la possibilité ou pas d'acquitter une autre personne dépend du principe général suivant: la personne qui acquitte doit être du même niveau ou à un niveau supérieur de 'Hiyouv (obligation d'accomplir une Mitsva) que la personne qui sera acquittée. Par conséquent, quelqu'un qui n'est tenu de réaliser une Mitsva par ordre Rabbinique, ne peut acquitter une personne qui est tenu quant à lui d'accomplir cette même Mitsva par ordre de la Torah.
Nous allons développer des cas pratiques qui dépendent de ce principe fondamental.
L'obligation pour les femmes de dire le Birkate Hamazone fait objet d'un doute halakhique (Safèk).
A savoir, si son obligation est d'ordre Toranique ou seulement d'ordre rabbinique. Dans le doute, elles ne pourrons pas rendre quitte un homme qui a consommé un Kabétsa de pain ou plus [littéralement « comme le volume (ou le poids) d’un œuf »]. Cette mesure varie entre 34 grammes et 58 grammes de nourriture.
En effet, dans ce cas l'homme qui a consommé un Kabétsa de pain se trouve face à un ordre de la Torah (12).
Par contre, si un homme a consommé moins qu'un Kabétsa, une femme ou même un enfant qui ont consommé un Kabétsa pourront rendre quitte cet homme (13).
Une femme ou un enfant n'ayant pas atteint l'âge de la Bar Mitsva qui auraient consommé juste un Kazaïte, n'ont l'obligation de faire le Birkate Hamazone que d'ordre rabbinique. Aussi, certains Décisionnaires sont d'avis qu'ils ne peuvent pas rentre quitte un adulte qui lui aussi aurait consommé un Kazaïte. On devra se plier à cet avis (14) .
Les "Ara'hamane" (en fin de Birkate Hamazone), sont un rajout institué par les des Richonim et même par leur prédécesseurs (15). Il semble donc qu'en cas de nécessité, on puisse laisser un enfant les lire (16) et répondre amen.
Mais on devra tout de même s'efforcer de dire le " 'Ossé Chalom " de clôture (17).
Cordial Chalom
1) Guémara Bérakhote 45b
2) Rachba Bérakhote 45b
3) Guémara Bérakhote 45b; Rambam Bérakhote chap. 5 Halakha 15; Choul'hane 'Aroukh chap. 193 par.1 et chap. 183 par.7
4) Chap. 193 alinéa 5
5) Iguérote Moché tome 2 résponsa 49
6) Kaf Ha'haïm alinéa 37
7) Michna Béroura chap. 193 alinéa 5
8) Choul'hane 'Aroukh chap. 167 par.11
9) Tossafot Bérakhote 45a et le Roch chap. 6
10) Voir le Méïri qui conteste cette raison ; ainsi que le Péri Mégadim rapporté dans le Michna Béroura chap. 193 alinéa 2 qui penche pour la première raison citée.
11) Choul'hane 'Aroukh chap. 197 par. 4; Michna Béroura alinéa 24
12) Choul'hane 'Aroukh chap. 186 par.1 et Michna Béroura alinéa 2
13) Guémara Bérakhote 20b et Choul'hane 'Aroukh chap. 186 par.2
14) Choul'hane 'Aroukh chap. 186 ; Voir aussi Maguèn Avraham et Michna Béroura alinéa 7 ainsi que le Kaf Ha'haïm par. 8 qui tranchent dans ce sens.
15) Voir le Tour chap. 189
16) Selon le Likouté Mariah
17) Aboudaram, Maté Moché