La bénédiction sur un aliment imprévu au menu

Chalom kvod harav,
Je suis à la maison chez moi et je fais la bénédiction sur un aliment ou une boissson, ensuite mon frère m'apporte un autre aliment dont la bénédiction est identique à celle récitée précedemment et dont je n'avais pas pensé en manger ou en boire au moment de la première bénédiction.
Dois je refaire la bénédiction et est-ce qu'il y a Ma'hlokèt (divergence de vue) entre Séfaradim et Achkénazim?
Est-ce la même réponse quand on est invité?
Merci de votre réponse.

Rav Aharon Bieler
Le Choul'hane 'Aroukh (1) traite précisément de cette question, et dans la mesure où les détails de ces lois sont très nombreux et complexes, nous les résumerons ainsi :

A. Une personne qui prononcerait une bénédiction sur un aliment, en ayant l'intention expresse d'acquitter tous les aliments, nécessitant une bénédiction identique, qui lui seraient présentés, sera de la bénédiction pour tous ces aliments. Cette manière d’agir est au demeurant la meilleure manière de faire, puisqu’elle évite nombre de doutes et d’incertitudes halakhiques (2).

B. Inversement, une personne qui consommerait des fruits en ayant l’intention explicite de ne pas en consommer davantage par la suite, ou encore qui aurait, à la fin de son repas, décidé d’arrêter d’en consommer, une nouvelle bénédiction s’imposera pour des fruits lui étant présentés par la suite (3).

C. Pour une personne qui consommerait des fruits ou tout aliment de manière non déterminée, c'est-à-dire sans avoir eu l’intention explicite d’acquitter toute autre nourriture à bénédiction égale qui lui serait présentée, et qui n’a par ailleurs, pas non plus eu l’intention de consommer uniquement l’aliment posé devant lui, la Halakha dépendra ici surtout des circonstances :

Si généralement et dans cette situation, la personne donnée aurait continué à manger de cet aliment en question, il n’est pas nécessaire de réitérer la bénédiction, dans la mesure où l’usage courant veut qu’une consommation aille en augmentant, et ne s’interrompt pas dès le premier aliment absorbé (4).

Mais si généralement, dans une telle situation, cette personne ne poursuit pas sa consommation au-delà de ce premier aliment, la bénédiction devra nécessairement être à nouveau prononcée (5).

D. Tout ceci n’est valable que pour un aliment parfaitement similaire au premier. En revanche, s’il est question d’aliment différent mais à la bénédiction identique, il y a lieu de distinguer différents cas de figure :

- Il y a ce que l’on considère comme étant une variété différente d’aliment, mais qui entre cependant dans la même catégorie. Ainsi, une pomme et une orange, toute deux nécessitant la bénédiction de « Ha’éts », sont deux variétés d’une même catégorie d’aliments. Par conséquent, si le second aliment est amené alors que le premier est encore présent, et que sa consommation n’est pas encore terminée, il ne sera pas nécessaire de répéter à nouveau la bénédiction (6). Toutefois, pour le cas où la première consommation serait terminée, les avis divergent : selon le Choul'hane ‘Aroukh, il n’est pas nécessaire de réitérer la bénédiction, alors que selon le Rama, celle-ci sera à nouveau récitée (7).

- Par contre, des aliments de catégories totalement différentes nécessiteront systématiquement et selon tous les avis une nouvelle bénédiction (sauf si telle était l’intention explicite, comme nous l’avons mentionné plus haut).
Ainsi, celui qui aurait récité la bénédiction sur du poisson et à qui l’on aurait par la suite amené une boisson, ou encore qui aurait prononcé sa bénédiction sur de la viande, et à qui l’on présenterait ensuite du chocolat, devra nécessairement répéter la bénédiction (8).
Toutefois, si l’habitude veut qu’un aliment soit habituellement consommé avec une certaine boisson, il ne sera pas nécessaire de réitérer la bénédiction.

E. Enfin, pour en venir au cas d’un invité dans la maison de son hôte, il apparaît clairement du Choul'hane ‘Aroukh (9), qu’un invité est directement dépendant de l’intention de son hôte. C’est pourquoi si l’invité prononce une bénédiction sur un premier aliment, sans qu’aucune intention explicite ne soit exprimée, cette bénédiction sera valable pour tous les aliments dont la bénédiction est identique (10). Toutefois, si l’intention de l’invité était explicitement d’arrêter de manger, une nouvelle bénédiction s’imposera (11).

Kol Touv
1) Chap. 206 par. 5
2) Rama Ora’h ‘Haïm 206 par. 6
3) Michna Béroura idem 20
4) Michna Béroura idem
5) Vézote Habérakha chap. 7
6) Michna Béroura idem 22
7) Cette discussion entre les décisionnaires n’est pas explicite dans les lois sur les bénédictions, chap. 206 du Choul'hane ‘Aroukh Ora’h ‘Haïm. Celle-ci se trouve en réalité dans la section Yoré Dé’a, chap. 19, dans les lois sur la Ché’hita. Il est vrai que sur place, le Chakh ainsi que d’autres décisionnaires sont d’avis d’interpréter le Rama de manière à ce qu’il ne s’oppose pas à l’avis du Choul'hane ‘Aroukh, le Michna Béroura paragraphe 22 ainsi que dans le Cha’ar Hatsiyoune 23 aboutit cependant à la conclusion l’avis du Rama est bien que pour deux variétés différentes de fruits, il faille répéter la bénédiction
8) Il y a lieu de préciser que lorsque le Michna Béroura par. 21, parle de deux catégories différentes d’aliments en parlant de « poisson et de liqueur », il ne faut pas en déduire que leur dissemblance se traduit par le fait que l’un est solide et le second liquide. Le principe des catégories différentes de nourritures relativement aux bénédictions se situe de toute apparence dans le fait que l’un est un plat de consistance, généralement servi au milieu d’un repas, alors que le second n’est qu’un dessert ou un apéritif. Ainsi, il apparaît que la viande, le poisson, la volaille ou les œufs entrent tous dans une même catégorie d’aliments, qui ne nécessitent pas une seconde bénédiction selon le Choul'hane ‘Aroukh cité plus haut – Vézote Habérakha chap. 7
9) Chap. 179 par. 2
10) Vézote Habérakha idem
11) Michna Béroura idem. 10