Laisser un plat dans un four allumé la veille de Chabbate

Peut-on laisser un plat au chaud dans le four du vendredi aprés-midi avant l'entrée de Chabbate et sortir le plat du four pour la Sé'ouda du vendredi soir ?

Merci

Rav Aharon Bieler
Hormis l'interdiction de la Tora de cuire des aliments le Chabbate, les Sages interdirent également de "laisser" [Chéiya], sous certaines conditions, des aliments sur un feu la veille de Chabbate.
En effet, les Sages estimèrent que si le plat laissé sur le feu n’était pas totalement cuit, il existe un risque que l'on en vienne à remuer les braises et à attiser le feu, afin que le plat cuise plus rapidement.

En conséquence, il est interdit de laisser un plat qui ne serait pas totalement cuit (ou tout au moins cuit jusqu'au stade de "Maakhal Bèn Drossaï", c'est-à-dire 1/2 de la cuisson finale, selon le Rama) sur un feu découvert.

En revanche, si l'aliment en question est parfaitement cuit selon le Mé'habèr (auteur du Choul’hane ‘Aroukh), ou bien a atteint 1/2 de sa cuisson selon le Rama, il sera permis de le laisser sur un feu.
Ou encore, il serait permis de laisser un plat qui ne serait pas complètement cuit sur un feu qui serait "couvert" ou "vidé de ses braises" [Garouf Vékatoum], de sorte que l'on n'en vienne pas à l'attiser.

Dans ce dernier cas, il sera interdit de refermer la porte du four après l’avoir ouverte car la fermeture aurait pour effet d’accélérer la cuisson de ce plat, ce qui est évidemment interdit. (1)

De prime abord, il semblerait que dans la mesure où les résistances d'un four sont entièrement recouvertes, on pourrait considérer ce feu comme étant "couvert".
Il serait donc permis d’y déposer avant le Chabbat un plat, quand bien même celui-ci continuerait à cuire.
Cependant, étant donné que telle est la structure habituelle d'un four, dont la cuisson se passe précisément avec des résistances recouvertes, il est impossible d'affirmer que le feu est ici "couvert".

En outre, la mise en marche d'un four n'est de nos jours plus du tout liée au feu proprement dit, mais uniquement à des boutons que l'on actionne pour laisser passer le courant électrique ; et dans la mesure où ces boutons ne sont pas recouverts, on ne peut assimiler un four de cuisson actuel au feu couvert de l'époque de la Guémara.

Par conséquent, il ne serait permis d'y déposer avant l'entrée du Chabbate uniquement des plats qui rempliraient la seconde condition mentionnée, c'est-à-dire qui seraient, selon la coutume séfarad, entièrement cuits au point d'être arrivé à un stade où une cuisson supplémentaire ne ferait que l'abîmer [Mitstamèk Véra Lo], ou bien selon le Rama, pour les Achkénazim, des aliments qui auraient tout au moins atteint 1/2 de leur cuisson.

Précisons également que tout ceci n'est vrai que pour un four dont l'ouverture ne provoquerait pas l'allumage d'une ampoule, ou bien qui ne serait pas équipé d'un thermostat, qui risquerait de se mettre en marche lors de l'ouverture de la porte du four.

Enfin, une autre permission serait envisageable selon le Rama (2). Il indique en effet que dans le cas où le four serait "scellé au ciment", c'est-à-dire dont l'ouverture serait obstruée de manière à ce que le risque que l'on en vienne à attiser le feu n'existe plus du fait de la présence de cet avertissement, tout aliment pourrait y être déposé avant le Chabbate. Par conséquent, il serait également permis de laisser un plat dans le four si l'on en recouvre les boutons avec du ruban adhésif (3).

Il n'est permis de laisser dans un four allumé que des plats entièrement cuits, au point qu'une cuisson supplémentaire abîmerait les aliments.
On pourra le sortir sans problème pour un des repas de Chabbate.

Kol touv
1) Voir Choute Or Létsiyone tome 2 chap.17 par.4 et 9
2) chap. 254, 1
3) Or'hote Chabbat chap. 2. 15