Peut-on retirer chabbate la queue du radis avant de le manger, ou est-ce considéré comme un acte de tri ("Borèr") ?
Rav Meir Cahn
L’un des 49 travaux (Mélakhote) interdits le Chabbate, est celui de Borèr, effectuer un tri (1). Cette Mélakha (ce travail) fait partie des Mélakhote (des travaux) liées à la préparation du pain (Sidoura Dépate), se situe chronologiquement après celle de vanner, et consiste au tri des pierres et des cailloux qui se sont mélangés aux grains du céréale (2).
La définition de ce travail est la séparation d’un aliment, des détritus ou des déchets (Péssolèt) qui y sont mélangés (3). Ainsi, c’est dans la mesure où le « mélange » de l’aliment avec les détritus représente une dégradation pour l’aliment et une entrave à sa consommation, et que la séparation constitue un Tikoune (une réparation, une amélioration), que la Mélakha (le travail) aura été transgressée (4).
Il y a lieu de faire une distinction entre diverses catégories de Péssolèt (de détritus ou déchets). Ainsi, une Péssolèt qui est absolument inconsommable, ou absolument inutilisable (5), est considérée comme la Péssolèt ‘par excellence’. La trier et la retirer du consommable ou de l’utilisable, implique la transgression de la Mélakha (du travail) de Borrèr (de trier) (6).
Une autre forme de tri, est celui qui va séparer deux espèces pareillement consommables ou utilisables, alors qu’une seule d’entres elles sera destinée à une utilisation immédiate. L’espèce destinée à un usage ultérieur sera définie comme la Péssolèt (le résidu), par rapport à l’aliment séparé pour être immédiatement consommé (7). Et donc, retirer cette Péssolèt de l’ensemble que l’on qualifie de « mélange », sera transgresser un interdit Déoraïta (d’ordre toranique) (8). Pour ne pas enfreindre cet interdit, c’est l’aliment ou l’objet que l’on veut immédiatement utiliser qu’il faudra retirer de l’ensemble (9).
Une troisième catégorie de Péssolèt (de résidu), est celle d’un aliment qui pourrait être consommable, mais qui n’est généralement pas consommé, si ce n’est en cas de Cha’ate Had’hak (de force majeure). Séparer cette Péssolète de l’aliment ou de l’ensemble, sera transgresser un interdit Dérabbanane (d’ordre rabbinique) (10).
Enfin, une quatrième sorte de Péssolèt (de résidu) est celle d’un aliment qui, tout en étant parfaitement consommable, n’est pas du goût de tout le monde. Pour les personnes qui s’abstiennent rigoureusement d’en manger, celui-ci sera considéré comme une Péssolèt (11).
Vraisemblablement, les queues de radis quoique étant comestibles, ne sont généralement pas consommées avec le légume. Ainsi, elles seraient à classer dans la troisième catégorie de Péssolèt (de résidu), et la séparation de leurs racines entraînera la transgression de l’interdit de Borèr, Midérabbanane (tri interdit le Chabbate, d’ordre rabbinique).
La manière la plus simple d’ôter ces queues, sera de les séparer des racines en prenant soin de ne pas couper juste, au bout de celles-ci, mais en enlevant également un petit morceau de chair (12). La raison pour laquelle cette manière de procéder ne pose pas de problème, est que la Péssolèt n’a pas été retirée en faisant un tri (Bédérèkh Bréra). C’est plutôt le « mélange » dans son entier, détritus autant que chair consommable, qui a été séparé du reste de la racine (13). En conséquence, il sera permis de préparer l’aliment, même pour une consommation ultérieure, et même avec un ustensile réservé au tri (Kéli Haméyou’had Lékakh) (14).
Une autre possibilité de retirer la queue d’un radis, serait de le faire à la main, ou avec un ustensile qui n’est pas réservé au tri, et ceci juste avant de le consommer, tout en prenant soin de retirer l’aliment de la Péssolèt (pas la Péssolèt de l’aliment) (15).
Kol Touv
1) Michna Chabbate, 73 a
2) Guémara Chabbate, 74 b, et Rachi ad. loc, intitulé Chékèn ‘Ani
3) Voir Rachi, Chabbate 73 b intitulé Haïnou
4) Voir le Biour Halakha, chap. 319 par. 3 intitulé Léékhol Miyad
5) Voir le Rachi Chabbate 74 b, intitulé Chéva’
6) Choul’hane ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm chap. 319 par. 4. Voir aussi le Yérouchalmi, Chabbate Pérèk 7 ; le Michna Béroura, ad. loc. alinéa 61, ainsi que le Biour Halakha, ad. loc. par. 16, intitulé Ela ; le Michna Béroura, ad. loc. alinéa 29 et le Biour Halakha ad. loc, intitulé Déhavé-Lé
7) Choul’hane ‘Aroukh, ad. loc. par. 3 et Rama, ad. loc, Michna Béroura, ad. loc. alinéa 12. Voir aussi le Biour Halakha ad. loc, intitulé Ounania’h, qui ramène à ce sujet la Ma’hlokète opposant le Roch, le Téroumate Hadéchèn et le Rama, du Rambam
8) Biour Halakha ad. loc.
9) Choul’hane ‘Aroukh, ad. loc
10) Chabbate 134 a, et Tossafote, ad. loc. intitulé Hakha, le Maguide Michné, Pérèk 1 de Chévitate Ha’assor, Michna Béroura, ad. loc. alinéa 7 ; voir aussi le Cha’ar Hatsiyoune, ad. loc. alinéa 45. Voir encore le Michna Béroura, ad. loc. alinéas 15 et 40, ainsi que le Chévitate Hachabbate, Mélékhèt Mérakèd alinéa 8, et le Péri Mégadim, Michbétsote Zahav, ad. loc. alinéa 2
11) Péri Mégadim, Michbétsotc Zahav ad. loc, Chvitate Hachabbate, ad. loc. par. 9. Voir aussi le Biour Halakha, ad. loc. par. 10 intitulé Ho’il, et le Choute Iguérote Moché, tome 6 chap. 74
12) Voir le Biour Halakha, ad. loc. par. 4, intitulé Haborèr ; le Michna Béroura, ad. loc. alinéa 61, ainsi qu’au chap. 504 alinéa 20
13) Voir le ‘Hazone Ich, chap. 53, et le Michna Béroura, chap. 319 alinéa 61, qui explique ainsi la permission que donne Taz de retirer à la cuillère une mouche tombée dans un liquide, en enlevant un peu de ce dernier avec l’insecte. Voir aussi le Graz, par. 24
14) Voir le ‘Hazone Ich, chap. 54 par. 3, selon le Biour Halakha. Le ‘Hazone Ich, lui, interdit ce procédé, car somme toute, l’intention est de faire un tri. Néanmoins, en consommant le peu de chair retiré avec la Péssolèt, cet acte restera permis, selon le ‘Hazone Ich également
15) Choul’hane ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm chap. 319 par. 1. Voir aussi le Choul’hane Chélomo, Hilkhote Chabbate chap. 319 par. 3, page 370, ainsi que le Chémirate Chabbate Kéhilkhata, chap. 3 par. 35