Maoz Tsour - Le chant de 'Hanouka



Peu de personnes arrivent à comprendre la signification de ce texte quelque peu ésotérique. Pourtant, il est devenu l’hymne incontesté de ‘Hanouka et il est entonné dans toutes les maisons juives durant l’allumage des bougies. Quand a été écrit Maoz Tsour ? Que signifient ces paroles ? Et qui est donc ce « roux » qu’Hachem doit repousser ? Éclaircissement.

Maoz Tsour Yéchouati : ce chant de ‘Hanouka est sur toutes les bouches malgré ses paroles particulièrement complexes. Écrit à la fin du 12e siècle ou au début du 13e en Allemagne, à l’époque des Croisades et des exactions commises contre les Juifs, il a été adopté par toutes les communautés, qu’elles soient séfarades ou ashkénazes.

L’auteur, un certain Mordé’haï, a écrit son nom en acrostiche. Toutefois, on ne sait pas précisément de qui il s’agit. Certains évoquent rabbi Mordé’haï Ben Hillel de Nuremberg, qui a lui même été victime des persécutions, d’autres estiment que l’auteur est rabbi Mordé’haï Ben Its’hak Halévy, un auteur de piyoutim né en Italie avant de s’installer à Mayence, en Allemagne.

Quoi qu’il en soit, l’auteur a choisi d’écrire une strophe par exil ou persécution, tout en concluant toujours sur une note optimiste, et décrivant comment le peuple juif a finalement été sauvé.

La première strophe, écrite au présent, est toute entière dédiée à l’espoir que très bientôt, le Temple sera reconstruit (« Tikon Bèt Téfilati », sera érigée ma maison de prière) et que les ennemis d’Israël, comparés à des chiens, seront exterminés. Les autres strophes décrivent toutes les fois où le peuple juif a été sauvé de ceux qui voulaient le détruire.

La seconde strophe parle de la sortie d’Égypte, qu’Hachem a réalisé « par Sa main étendue » à laquelle a précédé un esclavage douloureux (« Ils ont rendu ma vie amère »).

La troisième strophe est consacrée à l’exil de Babel, qui a pris fin « au terme de 70 ans ».

La quatrième strophe est liée à Pourim et au plan de Haman, confronté à Mordé’haï, de la tribu de Binyamin, Haman dont « les fils ont été pendus à un arbre ».

Il faut attendre la cinquième strophe pour que le sujet de la fête de ‘Hanouka soit abordé : « Des Grecs se sont assemblés sur moi, au temps des Hasmonéens, ils ont pénétré les murailles de mes tours et souillé toutes les huiles ». Est souligné ensuite le miracle de la fiole d’huile et les huit jours de fête qu’il a suscités.

Vient ensuite la sixième strophe, sur laquelle de nombreux spécialistes de la liturgie juive ont débattu, certains soutenant que cette strophe faisait partie du texte d’origine, mais avait été perdue - ou dissimulée - durant des siècles, d’autres affirmant que sa rédaction était postérieure à celle du fameux Mordé’haï. Quoi qu’il en soit, cette strophe, dans laquelle nous demandons à Hachem de « révéler Son bras saint » et de « venger le sang de Tes serviteurs », n’est apparue qu’aux alentours du 18e siècle à Amsterdam.

Le fameux « roux » ("Admone" dans le texte) évoqué dans cette strophe serait selon certains Barberousse, l’empereur germanique romain, qui a régné au 12e siècle et mené des Croisades particulièrement violentes. D’autres commentateurs estiment qu’il ne s’agit pas d’une personne en particulier, mais d’une expression qui regroupe tous les Chrétiens, issus de Rome et de Édom.

Durant de très nombreuses années, cette strophe a été retirée du chant de Maoz Tsour, car considérée comme trop violente, voire provocatrice par rapport aux Chrétiens. Jusqu’à aujourd’hui, certaines communautés d’Allemagne, Hollande et Grande-Bretagne s’arrêtent d’ailleurs à la cinquième strophe.

Quant à l’air de Maoz Tsour, ironie du sort, il est issu d’une marche allemande datant du 16e siècle. Certains ont donc essayé de modifier cet air pour un air plus « authentiquement juif », sans succès : Maoz Tsour reste la vedette incontestée de la fête de ‘Hanouka.

Traduction du premier couplet :

Puissante citadelle de mon salut,
Te louer est un délice.
Restaure la Maison de ma prière
et là, nous apporterons le sacrifice d'action de grâce.
A l'époque où Tu prépares l'écrasement
de l'ennemi qui blasphème.
Alors j'achèverai par un chant de louange,
l'inauguration de l'Autel.