Un pas de Géant

L'amour que Rabbi Isser Zalman Meltzer (1870-1953) éprouvait pour son prochain était légendaire.

Tous les rabbanim, fidèles, Ba'houré Yéchiva (étudiants de Yéchiva) et même les enfants qui avaient l'occasion de le rencontrer, repartaient emplis d'un merveilleux sentiment de bien-être. Au cours de ses conversations avec les gens, il s'efforçait de renforcer et non d'affaiblir l'estime d'eux-mêmes, tout particulièrement lorsqu'il s'adressait à des Ba'hourim en train d'étudier. En outre, son dévouement prenait souvent le pas sur son propre confort.

Dans cette histoire remarquable contée par Rabbi Chlomo Lorincz, ancien représentant d'Agoudath Israël à la Knesset, nous avons l'occasion d'apprécier le caractère de Rabbi Isser Zalman.

Au cours des années 40, Israéliens et Arabes menaient une guerre d'usure incessante. Les Arabes lançaient des bombes et des grenades à travers Jérusalem. Aucun quartier de la Ville Sainte n'était épargné, et des milliers des gens cherchaient refuge dans les abris souterrains environnants.

Mais R' Isser Zalman refusait de descendre dans les abris. Quelle que fût l'intensité des bombardements, il disait toujours à sa femme, la Rebbetzin Baila Hinda, que son étude de la Torah était la meilleure des protections.

Une après-midi, cependant, les grenades et les bombes se mirent à pleuvoir avec une intensité jusqu'alors inégalée. La Rebbetzin terrifiée supplia son époux de se réfugier dans l'abri souterrain le plus proche. Cette fois elle ne tolérerait pas de refus. A contrecœur, Rabbi Isser Zalman referma sa Guemara et accepta de l'accompagner dans l'abri local.

Au moment où il descendait les nombreuses marches qui menaient de sa maison à la cour, une grenade explosa tout près d'eux. Un éclat déchira la jambe de Rabbi Isser Zalman.(Il dut par la suite porter un plâtre pendant plus d'un an pour que sa blessure guérisse correctement.) Sa femme se mit à hurler au secours, mais Rabbi Isser la fit taire immédiatement.

"Tu ne peux pas appeler au secours à présent," lui intima-t-il d'un air angoissé. "Tous ceux qui sont dehors en ce moment sont en danger de mort. Nous ne pouvons pas demander aux gens de risquer leur vie pour venir m'aider maintenant. Je vais attendre que les bombardements se calment, puis nous ap¬pellerons. "

Et c'est exactement ce qu'il fit. Malgré la douleur atroce, il supporta cette terrible souffrance afin de ne pas mettre en danger, fût-ce pour un instant, la vie d'un autre Juif.